La Gazette du BPF

n° 12 – Printemps 2014

Souvenirs de mon brevet des provinces françaises, un jeu qui a duré 30 ans

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La Bérarde, l’ultime contrôle de Pierre.

30 ans ont été nécessaires pour réaliser un objectif qui a germé en 1973 en observant des cyclotouristes confirmés de mon 1er club de Vernon (27) qui s’amusaient à faire « tamponner » des cartons étranges sur lesquels il y avait des noms de sites français remarquables.

Mais en y regardant de plus près, on s’aperçoit que la France métropolitaine est divisée en 36 Provinces, 90 départements, 6 sites par département donc 540 « tampons » de passage à obtenir ! (534 aujourd’hui puisque les « jeunes » sont privés du 75 !).

Pour attirer le client, on commence par lui dire : ce n’est pas grave si tu ne fais pas tout, commence par faire 1 pointage par département comme çà tu seras lauréat du BCN (Brevet de Cyclotourisme National), c’est le piège !

Facile le BCN, surtout pour un amateur des grandes distances (Flèches de France, Relais, Montagnards, Mer Montagne, V.I.), mais on s’aperçoit un jour avec surprise et rage, en coloriant minutieusement une carte offerte par la FFCT, après 15 ans de grandes randonnées, que tous les petits points représentant les sites BPF sont encore partout sur votre belle carte de France ! Il faut alors tout recommencer scientifiquement en reliant ces petits points-ça rappelle des jeux de magazines- et c’est reparti pour 15 ans !

Pour ceux qui pensent connaître la France, êtes-vous passés un jour dans ces sites : Loubaresse (07), Montgueux (10), St-Georges-Nigremont (23), Vertheuil (33), La Bérarde (38) ? Ce dernier site a été mon 540ème contrôle, je me l’étais réservé depuis longtemps. Pouvez-vous situer Rouvres-Sur-Aube (52), Montréal-sur-Serein (89), Itxassou (64) ? Grâce à la FFCT vous pouvez faire partie des rares touristes à poser les yeux sur les curiosités historiques ou les paysages de ces lieux.

Certes, tout le monde connaît ces passages célèbres du Tour de France : Le Mont- Ventoux , le col de l’Iseran, le col du Tourmalet, on m’a même obligé à faire du vélo à Paris avec pointage à Notre-Dame, on m’a obligé à monter (à pied) un sentier à 30% pour trouver porte close à l’abbaye de St-Martin-du-Canigou, quand on se fait avoir 1 fois, 2 fois, .. On fait du vélo avec son appareil photo. Il est sympa le règlement de la fédé, on peut faire une photo de la pancarte (avec son vélo) ou encore mieux avec sa propre personne habillée en cycliste si une âme charitable veut bien vous photographier ; on est parfois pris pour un farfelu, imaginez un habitant du coin qui vous surprend en train de photographier votre vélo devant la pancarte d’Exoudun dans les Deux-Sèvres !

Un petit sondage sur mes contrôles :

  • 25% réalisés dans des bars tabac (je ne fume pas mais je bois)
  • 20% réalisés dans des hôtels restaurants (je mange et dors parfois)
  • 15% réalisé avec des photos (surtout sur la fin car la tamponite ça fatigue)
  • 15% réalisés dans des boulangeries (je suis amateur de gâteaux)
  • 10% réalisés dans les offices de tourisme (ne jamais rouler avant 10h, jamais entre 11h55 et 15h05, et de préférence le samedi en juillet/août), j’exagère un peu c’est dans ces lieux qu’on a le meilleur accueil et les plus beaux tampons.
Un authentique document : la carte BPF du département de la Seine, aujourd’hui disparu. (c) P.Geoffriau.

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J’ai connu des cartons de pointage avec des couleurs qui ont évolué dans le temps : marron, bleu, jaune, vert. Quand je sortais un carton incomplet de couleur marron en 2000 mes copains se moquaient un peu de mes vieilleries.
On a parfois des sueurs froides quant à l’authenticité des tampons, car le contrôleur général de la fédé est très pointilleux, il m’est arrivé de m’apercevoir le lendemain de ma visite à Blaye (33) que la mention portée sur mon carton était matérialisée par « Maison du vin Blaye-et Bourg » heureusement le chef homologateur de cette époque était du coin. Accordé ? Ouf !
Puis il y a celui que le gentil commerçant met 5 minutes à retrouver et qui se révèle illisible, il y a celui qui bave partout quand vous refermez votre précieux carton, il y a celui qui est difficile à obtenir car le tamponneur soupçonneux se demande dans quel piège il va tomber en certifiant votre passage, il y a celui qu’ on attend 30mn car tout le village se met en 4 pour vous satisfaire, exemple dans l’Aude à La Fajolle, car l’exercice consistait à rechercher le maire de commune qui était aux champs, et comme il était le seul à savoir dans quel tiroir de la mairie était le fameux tampon, on ne peut pas résister à un tel déploiement de gentillesse, et puis il y a cette vieille commerçante dans le village de Cambon (34) qui a été déchue de la possession d’un sésame très rare : le tampon officiel BPF estampillé FFCT, car quelqu’un a osé supprimer ce contrôle au profit d’une autre localité et qui se demandait pourquoi on lui avait fait cet affront, elle m’a ouvert le livre d’or spécial BPF ! Et oui en ce temps là ,on avait un établissement recommandé par site pour faire homologuer son passage ! Imaginez donc cette dame dont la visite de ces « étrangers » était une occasion de voyager, ce jour là j’ai fait la photo de la pancarte, et après vérification je m’étais bien présenté dans un site annulé par la FFCT (mon contrôle a été toutefois accepté).
Je peux vous affirmer que chaque passage a une histoire quand je sors de ma bibliothèque ces précieux trésors parfaitement classés dans mes albums.

Mais tout a une fin. Le 1er février 2003, lors de l’AG du CoDep 79 j’ai reçu mon diplôme estampillé du N° 270 de la main de personnes étonnées et interrogatives, ce qui prouve bien le caractère confidentiel de ce brevet FFCT.

Mais vous qui ne me connaissez pas, ne me croisez pas parce que je suis très contagieux. La preuve, ma femme a attrapé la maladie, elle s’est mise en tête de faire aussi bien que moi. Grace à ma grande expérience « de la jonction des petits points » j’ai roulé gratis et elle a brillamment réussie en 2006. J’ai fait également de gros dégâts en Seine-et-Marne après mon passage dans le club de Dammarie-Les-Lys, quelques cyclos sont devenus accros à cette drogue des BPF.
Ah, la France profonde ! Je peux prouver que cela existe. Jetez un œil sur le guide du cyclo édité par la FFCT. Votre Président de club cache bien ce document, car si vous êtes atteint par ce virus, c’est terminé, on ne vous revoit plus aux sorties locales ou peut-être 30 ans après pour recevoir votre trophée. Mais alors vous êtes méconnaissable, vous parlez une langue étonnante, vos amis ne peuvent plus prononcer le nom d’une localité française sans que clamiez : « ah oui BPF ! » ou « ah oui près du BPF … ! » A force çà agace ; ils n’oseront plus vous parler ou alors un curieux vous demandera un jour « je n’ai pas compris qu’est que c’est ? » C’est gagné : un de plus qui va être endoctriné.

Pierre GEOFFRIAU – Lauréat N°270

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